Mycobacterium bovis est la bactérie responsable d'une maladie dite « tuberculose bovine » (TB) qui affecte les bovins d'élevage et sauvages, mais aussi de nombreux animaux sauvages mammifères autres que les bovins. C'est l'une des formes du bacille de Koch (BK) responsables de diverses formes de tuberculose humaine. Elle en est très proche génétiquement, mais avec un agencement différent des gènes. C'est à partir d'une forme atténuée de ce bacille qu'est produit le vaccin BCG
Règne | Bacteria |
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Embranchement | Actinobacteria |
Ordre | Actinomycetales |
Sous-ordre | Corynebacterineae |
Famille | Mycobacteriaceae |
Genre | Mycobacterium |
Espèce
Mycobacterium bovis peut franchir la barrière des espèces et infecter l’Homme[2]. Elle est donc classée parmi les « zoonoses » (infections naturellement transmissibles de l'animal à l'homme et vice versa).
On en connait de nombreuses souches, plus ou moins virulentes.
La recherche en termes de moyens de lutte épidémiologique a principalement porté sur des essais de vaccination[pas clair], puis l’éradication de porteurs sauvages (avec le risque quand il s’agit d’espèces territoriales (blaireau, opossum) de contribuer à élargir les zones touchées). La vaccination (qui s’est montrée bien plus efficace chez les renards sauvages que le piégeage dans le cas de la lutte contre la rage en Europe) a concerné le bétail, mais non les espèces sauvages.
C'est une maladie probablement très ancienne, comme la tuberculose humaine.
Elle est courante chez les bovins, et durant la première moitié du XXe siècle a probablement causé une grande partie des pertes d'animaux de ferme.
En 1998, l’OMS a estimé que la tuberculose bovine (TB) avait tué environ 30 millions de personnes pendant la décennie 1990-1999, ce qui est moins que la tuberculose humaine (80 millions) mais reste très important. Pour ces deux maladies, la plupart des malades et des morts étaient dans les pays en développement.
La TB est présente chez de très nombreux animaux, dans la plupart des pays en développement, où la surveillance et le contrôle sont absents ou insuffisants, rendant la prospective écoépidémiologique très difficile.
De manière générale, la tuberculose préoccupe l'OMS, l'OIE et de nombreuses autorités sanitaires en raison d'une recrudescence dans certains pays, et d'une incidence croissante, notamment en raison du HIV/SIDA qui a aussi favorisé un développement nosocomial de la maladie[3].
Ce bacille est une bactérie aérobie à croissance lente ; il lui faut 16 à 20 heures pour produire une seule génération.
Il survit bien dans des tissus congelés[4], mais est détruit par la cuisson et divers biocides (ex tétraborate de sodium utilisé comme conservateur des tissus, dont en taxidermie)[4].
Les chercheurs étudient avec attention le génome de cette bactérie, notamment parce qu'il est proche de la tuberculose humaine et que de nombreuses bactéries sont capables d'échanges horizontaux de gènes.
Le séquençage complet[5] de Mycobacterium bovis, publié en 2003 a permis de comparer ce bacille avec ceux de M. tuberculosis et M. leprae[6]. Il s'est montré étonnamment proche de la bactérie responsable de la tuberculose humaine, M. tuberculosis (semblable à 99,95 %[6]), mais une moindre redondance de l’information génétique fait qu'il a une taille plus petite[6]. Ce génome montre néanmoins une capacité plus large de codage de composants pour la paroi cellulaire et certaines protéines sécrétées[6]. Ceci évoque des interactions hôte–bacille plus complexes, et peut être un rôle dans l’ « évasion immunitaire » (capacité du bacille à échapper aux globules blancs)[6]. En outre, les gènes de M. bovis et de M. tuberculosis sont les mêmes, ce qui invite à penser que leur expression différentielle pourrait être un facteur-clé de leur pathogénicité et de leurs « tropismes d'accueil » (préférence en termes d’hôtes : humains, bovins ou autres mammifères)[6].
Ces découvertes confirment ou précisent des hypothèses faites dans les années 1990 sur la base des premiers éléments de cartographie génomique de M. bovis et M. tuberculosis[7].
Les chercheurs ont constaté que l'expression des gènes de ce bacille diffère fortement de celle de ceux de Mycobacterium tuberculosis responsable de la tuberculose humaine[8], bien que ces deux bactéries soient génétiquement très proches. Si l'on compare les deux bactéries au moment de leur croissance exponentielle, une expression différentielle des gènes est détectée dans 258 gènes, soit 6 % du génome total. Les principales variations concernent des gènes codant des protéines impliquées dans le métabolisme intermédiaire et la respiration, la construction de la paroi cellulaire et des protéines hypothétiques. Par rapport à M. tuberculosis, les généticiens notent l'expression d'un plus grand nombre de régulateurs de transcription chez M. bovis[8].
Les paramètres (pH, température, teneur en eau, teneur en sels, compétition avec d’autres organismes, présences de molécules naturellement bactéricides, etc.) en vertu desquels M. bovis peut ou pourrait se développer hors de l’organisme animal vivant, ne sont pas encore clairement connus.
La bactérie a montré en laboratoire certaines capacités à survivre un certain temps (très variable selon les conditions) hors de l’organisme. Mais elle ne se reproduit alors que très lentement, même dans de conditions jugées idéales de température et d’environnement.
Selon les données disponibles elle ne peut pas se reproduire dans le lait, mais elle peut y survivre un certain temps (Sinha, 1994), de même que dans certains fromages à base de laits cru non pasteurisés.
Ce temps de survie varie selon les produits et selon leurs conditions de fabrication. La littérature scientifique contient peu de preuves ou indices de survie de M. bovis dans des produits tels que la crème fraîche, le yaourt, le beurre et la crème glacée, mais les études les plus nombreuses ont concerné les fromages.
Une certaine survie a été observée dans le beurre, certains fromages et le fromage blanc (dans le fromage blanc au lait cru, la survie est encore observée à 14 jours, mais plus à 17 jours ; le produit n'est alors cependant plus adapté à la consommation car il peut commencer à être contaminé par des moisissures. Des études ont concerné l'emmental, le cheddar, le gruyère, le munster, le camembert et le bleu d'Auvergne (« fromage bleu ») ; l’emmental a été particulièrement bien étudié, et on a montré que le processus de production avait dans ce cas une incidence sur les capacités de survie de M. bovis, peut-être en raison de l’échaudage à 53 °C du caillé durant 30–40 minutes, ce qui ne détruit pas M. bovis mais semble affecter sa capacité à survivre lors de la maturation du fromage. Pour d'autres fromages à pâte dure tels le cheddar, une grande variabilité dans le temps est observée avec des bactéries viables durant 60 jours à plus de 200 jours dans certains cas. Cette variabilité pourrait refléter des différences de concentration de cet organisme dans le lait utilisé.
La bactérie meurt dans les fromages à longue maturation (certains fromages sont ainsi travaillés jusqu’à un an, voire plus, par exemple le cheddar ou la mimolette vieille et extra-vieille, etc.).
Cette maladie infectieuse chronique affecte une large gamme d'hôtes mammifères, dont les humains et les troupeaux de bovins[9],[10] ; la bactérie infecte aussi des herbivores aussi variés que les cervidés, les camélidés (Chameau, mais aussi lama, alpaga, vigogne ou guanaco), des omnivores tels que le porc et le sanglier, ou des carnivores tels le chien, le chat domestique ou le chat sauvage, le renard, le coyote, les mustélidés, l’opossum ou des rongeurs.
Par contre, pour des raisons encore mal comprises, il affecte plus rarement les équidés, les caprins (chèvres et chamois) ou les ovins[9],[10].
Les lésions macroscopiques se présentent à l'autopsie comme des papilles ou grumeaux beiges ou jaunâtres répartis ou tapissant la surface de certaines organes internes. Chez les bovins, les tissus présentant le plus souvent des lésions macroscopiques visibles à l'examen post-mortem sont :
Les lésions macroscopiques et histologiques les plus visibles et fréquents touchent les ganglions lymphatiques de la région thoracique[11]. Des lésions semblables peuvent être observées chez d'autres mammifères tuberculeux dont le cerf[12]
Mycobacterium bovis peut néanmoins parfois être été isolé chez des bovins ne présentant aucune lésion macroscopique de la tuberculose. Parfois des lésions existent, mais dans une zone habituellement non examinée par le vétérinaire après abattage (ex : ganglion subiliaque)[11].
Dans la plupart des pays, la détection des lésions macroscopiques de la tuberculose lors de l'inspection vétérinaire des carcasses à l'abattoir est la principale méthode de détection des troupeaux de bovins (dont aux États-Unis dans les années 1990)[11].
Cette bactérie peut se transmettre et se propager de nombreuses façons, dont par exemple dans l'air expiré, les mucus et crachats, l’urine, les matières fécales et le pus.
L'infection se produit si la bactérie est inhalée, ingérée ou introduite sous la peau ou dans le sang, et plus facilement chez les individus en état de déficience immunitaire.
La maladie peut donc être transmise par contact direct avec l’animal malade (ou son cadavre) ou plutôt via ses excrétats ou par inhalation d'aérosols, selon les espèces concernées.
Ils sont encore mal connus, mais la bactérie a probablement co-évolué avec les troupeaux depuis la naissance de l’élevage.
La maladie pourrait dans certains contextes jouer un rôle dans la limitation de la surpopulation de certaines espèces sauvages, notamment en l’absence de prédateurs. Mais l'introduction par l'homme d'un variant pathogène dans une région du monde où les animaux sont immunologiquement « naïfs » à son égard peut décimer un grand nombre d'animaux.
Une étude attentive de l'évolution de la régression de la tuberculose humaine depuis le XIXe siècle (fait constaté dans de nombreux pays), a montré qu’elle a objectivement significativement régressé avant la découverte des antituberculeux, et même de la vaccination. Les épidémiologistes supposent que ce sont les progrès de l’hygiène, de l’alimentation et des conditions de vie qui y ont contribué[13],[14],[15].
Chez l'Homme, M. bovis est généralement transmise par du lait infecté[16], mais elle pourrait peut-être parfois aussi se propager par des microgouttelettes émises en aérosol par des animaux malades.
Dans chaque région du monde, les conditions écoépidémiologiques changent, en raison d'une faune différente, de conditions d'élevages de bétail différentes, et aussi parfois peut-être en raison du caractère introduit et devenu invasif de certaines espèces ou de la présence d'autres mycobactéries qui pourraient interagir avec les souches connues de tuberculoses. Les situations décrites ci-dessous illustrent ces situations différentes dont certaines sont jugées préoccupantes par les vétérinaires et écologues et/ou par les médecins.
En Nouvelle-Zélande où les colons d'origine européenne ont introduit de nombreux troupeaux (ovins, chevaux et bovins, mais aussi 7 espèces différentes de cervidés), c'est un marsupial, l'opossum d'Australie (Trichosurus vulpecula), qui semble actuellement le principal vecteur de dispersion du microbe.
Cet opossum est également allochtone ; il a été introduit (à partir de l’Australie) par les colons, pour sa fourrure. Après s’être enfui d’élevages et/ou avoir été relâché par des propriétaires, il s’est ensuite reproduit dans la nature, où il a peu de prédateurs et de pathogènes mortels. Il est aujourd’hui considéré comme espèce invasive dans le pays. Il est de plus en plus porteurs de la bactérie de M. bovis (environ 38 % de ces opossums étudiés en étaient porteurs dans les zones déclarées à risque d’infection pour le bétail. Dans ces territoires déclarés à risque, près de 70 % des nouvelles infections de troupeaux semblent liées à l'opossum ou à des furets, qui eux-mêmes peuvent être infectés ou réinfectés par différents variants de la bactérie à partir des excréments des troupeaux, de cadavres, etc.
En 1993, une loi dite « Biosecurity Act 1993 » a imposé une stratégie nationale de lutte antiparasitaire visant à contrôler si puis éventuellement éradiquer la maladie dans toute la Nouvelle-Zélande. Dans ce cadre, un « Conseil de la santé animale (AHB, pour « Animal Health Board ») a été créé ; il gère d'une part un programme national de dépistage de la maladie dans le bétail néozélandais, et d'autre part un important programme de contrôle de l'opossum. Ces deux programmes combinés visent - avant 2026 - à éradiquer M. bovis chez les vecteurs sauvages dans un territoire de 2,5 millions d'hectares (soit un quart des zones classées à risques de la Nouvelle-Zéland). Il s’agira ensuite d'étendre les actions à l’ensemble du pays[20].
Ce programme dit « TB-free New Zealand » est considérée comme " leader " dans le monde en la matière [21]. Il a réussi à diviser par plus de 10 le taux de troupeaux infectés de cerfs et de bovins (passés de plus de 1700 troupeaux en 1994 à moins de 100 en ).
Une grande partie de ce succès est selon le gouvernement attribuable au « contrôle » des opossums qui a permis de réduire les contaminations croisées entre les populations-réservoir et de briser le « cycle » de la maladie. Par exemple, à Hohotaka, au centre de la Nouvelle-Zélande (île du Nord, de 1988 à 1994, le piégeage de cet animal en aurait réduit la densité de 87,5 %. Dans le même temps, l’incidence annuelle de la TB dans les troupeaux locaux de bovins a diminué d'un taux comparable (83,4 %)[22].
Les opossums sont piégés ou tués par empoisonnés par des appâts par exemple empoisonnés au fluoroacétate de sodium (dit « Poison 1080 » en Nouvelle-Zélande) ou au cyanure de potassium, déposés au sol ou largués par voie aérienne[23].
De 1979 à 1984, le contrôle de l'opossum par les autorités a été stoppé, au moins provisoirement, officiellement en raison d'un manque de financement. Le tests réguliers et fréquents faits chez les troupeaux de bovins ont montré que le nombre de bovins infectés a ensuite de nouveau augmenté (jusqu'en 1994) [24]. La part du territoire national où des animaux sauvages ont été trouvés porteurs de la maladie est passée d’environ 10 % à 40 %.
L’opossum d’Australie semble être un vecteur de transmission de la maladie particulièrement efficace en raison du comportement qu’il adopte quand il y succombe : en phase terminale de tuberculose, il présente un comportement anormalement erratique, et il adopte un comportement diurne de recherche de nourriture (alors qu’il est normalement nocturne). Il semble aussi rechercher des lieux où se tenir au chaud et se rapproche des habitations et élevage, on l'observe alors dans paddocks d'élevages, où il attire naturellement l'attention du bétail et des cerfs « curieux » (Le cerf a aussi été introduit en Nouvelle-Zélande pour en faire des élevages producteurs de viande, peaux, velours et trophées. Ce comportement a pu être filmé[19].
Il y a environ 9,3 millions de têtes de bétail dans le pays, réparties en 71 000 troupeaux et de nombreux cerfs sont élevés en enclos ou ont fondé des hardes dans la nature. Ils y sont cependant moins densément présents que les opossums et sont donc supposés moins contribuer à disséminer les bactéries[25]. La santé des cheptels de bovins et d'ovins est une préoccupation majeure pour les autorités sanitaires, mais elles doivent aussi tenir compte du lobby de la chasse : sept espèces de grands cervidés sont chassés dans le pays par environ 40 000 chasseurs (à comparer à la population totale de 4,3 millions d'habitants)[25] ; ces chasseurs abattent environ 70 000 cerfs par an[25]. Selon le gouvernement, sa stratégie de lutte antiparasitaire nationale 1996-2001 a atteint son objectif de réduction du nombre de troupeaux infectés (de 1700 à 800), mais sans réussir à empêcher l'expansion géographique des « zones à risque de vecteur » (qui avaient en 2001 gagné 40 % de tout le territoire néozélandais[25]. Une seconde stratégie nationale a donc été mise en œuvre pour la période 2001-2013, avec l'objectif d'atteindre une prévalence de moins de 0,2 % dans les élevages de bovins et de cerfs en 2013. Cette fois, un test de vaccination des opossums sauvage est envisagée, au moyen d'un vaccin de type BCG distribué par voie orale via des appâts dispersés dans la nature[25].
Prévalence et risques : Dans les années 1930, il a été estimé que 30 %[25] à 40 % (selon les sources) des bovins du Royaume-Uni étaient porteurs de cette bactérie. Et au sein de la population humaine, les médecins détectaient annuellement environ 50.000 nouveaux cas de TB humaine[28],[29].
Aujourd’hui, selon le DEFRA et l'Agence anglaise de protection de la santé (Health Protection Agency ou HPA), le risque pour une personne de contracter la tuberculose bovine en Grande-Bretagne est très faible ; selon la HPA, les ¾ des 440 cas humains qui lui ont été signalés de 1994 à 2006 étaient âgés (> 50 ans, nés avant 1960, suggérant que la maladie était une réactivation d’une infection ancienne) et 20 % des cas étaient des personnes d’origine étrangère, probablement porteuses d’une infection acquise dans un autre pays. Un petit nombre de cas concernaient des personnes ayant eu des contacts avec des animaux infectés.
Au Royaume-Uni, depuis 1994 il n'y a plus eu aucune preuve de cas humain pouvant être relié à une consommation récente de viande ou autre produit d’origine bovine[30].
Le cas du blaireau : À la fin du XXe siècle, il a été démontré au Royaume-Uni que le blaireau était sensible à la bactérie, qu'il peut acquérir à partir des troupeaux qu'il approche (ou d’autres espèces) et éventuellement retransmettre à d'autres bovins domestiques, mais son rôle précis dans la transmission est mal mesuré et a été ensuite fortement relativisé. Avant que l'importante de son rôle écoépidémiologique ait été évalué et comparé à celui d'autres espèces, à la demande d'éleveurs, des campagnes de battues, tirs et empoisonnements ou piégeage du blaireau ont été lancées.
Des blaireaux (Meles meles) avaient déjà été trouvés porteurs de cette bactérie il y a une trentaine d’années, sans susciter d'émoi particulier, car c'est aussi le cas de quelques autres espèces et de nombreuses d'autres n'ont pas fait l'objet de campagnes de tests.
Puis en 1997, dans un contexte de crise sanitaire notamment lié au prion pathogène dit de « la vache folle », un comité d'examen indépendant a estimé que cet animal pouvait significativement contribuer à diffuser cette zoonose entre les troupeaux de bovins[31]. Le blaireau a alors focalisé l'attention des éleveurs et chasseurs ; et il est devenu la source d'une longue dispute (non terminée) entre les défenseurs anglais de l'environnement et des animaux (désireux de sauver cette espèce déjà en régression ou disparue d’une partie de son aire naturelle de répartition) et les agriculteurs-éleveurs, auxquels se sont alliés de nombreux chasseurs (souhaitant être autorisés à détruire les blaireaux par abattage, piégeage et empoisonnement, afin de réduire les pertes dans les cheptel).
Une première grande étude randomisée sur les effets de ces abattages intensifs a été faite, dont les premiers résultats ont été publiés en 2007[32]. Cette étude a été conçue et supervisée par un groupe scientifique se présentant comme « indépendant » sur la TB, dit ISG (Independent Scientific Group) [33].
Elle est basée sur une vaste expériences de terrain, où 3 stratégies sont testées et comparées dans une zone d’étude de 3 000 km2, avec un effectif dédié de 180 employés et un budget annuel de 7 millions $ (non compris les frais de laboratoire)[34] ; la première stratégie consiste à éradiquer de manière proactive (en les recherchant et en les tuant), tous les blaireaux d’un large territoire, en observant si la maladie régresse dans les élevages de ces territoires. La seconde stratégie consiste à tuer les blaireaux uniquement en réponse à des infections de bétail et autour des élevages. La troisième (situation "témoin") consiste à ne pas tuer les blaireau[35]. Les effets éventuels des 3 « stratégies » sur la prévalence de la maladie dans les élevages ont été étudiés.
En 2007, dans son rapport final[36], l’ISG a conclu que :
Le , à la Chambre des lords, le ministre chargé de l'environnement, de l'alimentation et des affaires rurales (Lord Rooker) a dit au nom du gouvernement « Nous nous félicitons du rapport final du groupe scientifique indépendant, qui augmente encore les preuves disponibles. Nous étudions attentivement les questions soulevées par ce rapport et continuerons à travailler avec l'industrie, les conseillers du gouvernement et des experts scientifiques dans la prise de décisions politiques sur ces questions »[37], mais le message que le blaireau était responsable de la zoonose semble persister chez une partie de la population anglaise.
En 2008, le RSPCA (Royal Society for the Prevention of Cruelty to Animals) a insisté sur l'urgence de réviser cette politique de destruction qui n'est pas justifiables par une prévalence d'infection de seulement 4 à 6 % chez les blaireaux[26],[38].
Au Royaume-Uni (comme ailleurs), bien d'autres mammifères (dont rongeurs connus pour être vecteurs de nombreuses zoonoses, et sangliers plus mobiles que les blaireaux) se sont révélés être infectés par la bactérie M. bovis. Ils étaient cependant souvent moins fréquemment infectés que les bovins (et les blaireaux). On cherche maintenant à mieux comprendre l'écoépidémiologie de cette zoonose.
Les études vétérinaires, épidémiologiques et écoépidémiologiques faites en Angleterre et au Pays de Galles dans les années 2000 ont alors montré que dans certaines régions du Sud-Ouest de l'Angleterre, les cervidés, et notamment le daim, sans doute en raison de leur comportement grégaire et devenu moins mobiles et parfois en surdensité en raison de l'absence de grands prédateurs, d'apports artificiels de nourriture, de l'insularisation des massifs forestiers et d'une fragmentation croissante des forêts ont été impliqués en tant que réservoir animal et comme possible vecteur pour la transmission de la tuberculose bovine[39],[40].
Il semblerait même que dans certaines régions, le daim a une responsabilité plus importante dans la transmission aux bovins et comme réservoir sauvage que le blaireau[39],[40]
ratio coût/efficacité : Il a été estimé en 2005 que les tentatives d’éradication de la TB ont coûté au Royaume-Uni environ £ 90 millions, sans grands résultats depuis plusieurs années. D'un point de vue vétérinaire, ces financements auraient pu être ou pourraient être selon l'EFRA plus efficacement utilisés dans une stratégie multidimensionnelle croisant différentes méthodes de lutte contre la maladie, y compris dans la faune sauvage[41].
Dans ce pays, la bactérie M. bovis est endémique chez le cerf de Virginie (white-tailed deer; Odocoileus virginianus) dans la partie nord-est de Michigan[42],[43] et dans le nord du Minnesota et sporadiquement détecté au Mexique.
Seul le cerf de Virginie a été confirmé comme un hôte sauvage lors de l’épidémie de TB qui a touché le Michigan, bien que d'autres mammifères tels que le raton laveur (Procyon lotor), et l’opossum (Didelphis virginiana) et le coyote (Canis latrans) puissent aussi servir d'hôtes réservoir ou final [44] Le fait que le cerf de Virginie soit un réservoir de la bactérie M. bovis est présenté comme un obstacle important à l’éradication de la maladie dans le bétail aux États-Unis et d'autre part, la chasse du cerf est une source importante de revenus pour le commerce local ; ainsi, en 2008, 733 998 chasseurs licenciés ont tué environ 489 922 cerfs de Virginie lors d'opérations présentées comme destinées à gérer ou contrôler la propagation de la maladie en limitant le nombre de ces cerfs. Ces chasseurs ont acheté plus de 1,5 million de « bracelets » pour le cerf. En 2006, cette chasse aurait rapporté 507 000 000 dollars à l'Économie du Michigan [45].
Au Canada, les bisons sauvages et d'élevages font l'objet d'un suivi (comme pour la brucellose[46].
La maladie est observée chez les bovins dans le monde entier, mais certains pays ont été en mesure de fortement réduire ou limiter l'incidence de la maladie grâce à des opérations de contrôle de type « Test et réforme » appliquées au cheptel bovin (les animaux sont testés, et ceux qui portent la bactérie sont tués).
Europe : La plupart des pays de l'Europe et plusieurs pays des Caraïbes (dont Cuba) sont maintenant pratiquement exempts de M. bovis dans leurs élevages, mais des foyers sont périodiquement repérés dans les élevages, et la bactérie reste présente dans la nature. Ainsi une étude récente (2004) a porté en Espagne sur 6 espèces : le cerf (Cervus elaphus), le daim (Dama dama), le sanglier (Sus scrofa), le lynx ibérique (Lynx pardinus), le lièvre (Lepus europaeus) et les bovins (Bos taurus), dans plusieurs territoires. Ces 6 espèces de mammifères ont été choisis pour leurs positions-clé dans les écosystèmes et parce qu’ils ont des relations reconnues avec le bétail. Les résultats de l'étude ont confirmé les liens bétail-faune sauvage : les mêmes souches de M. bovis infectaient plusieurs espèces sauvages autour des troupeaux porteurs de la même souche, sans que l’on ait retrouvé un spoligotype[47] localement prédominant.
Les auteurs de cette étude estiment qu'il faut mieux comprendre la transmission et de la distribution de la maladie pour mieux cibler les mesures de contrôle de la TB[48].
Au Canada : Là ce sont le wapiti et le cerf de Virginie qui sont porteurs de la bactérie, notamment dans et autour du Parc national Riding Mountain dans le Manitoba. Pour améliorer le contrôle et éliminer la tuberculose bovine, l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) a divisé le Manitoba en deux zones de gestion, avec un plan de lutte contre la tuberculose (RMEA) dans la zone où la maladie a été trouvée [49]. La maladie a aussi été trouvé dans les troupeaux de buffle africain en Afrique du Sud.
En Afrique du Sud : Des conséquences écologiques graves sont observées en depuis 1990. La TB s'y est rapidement développé dans la faune sauvage et a décimé les troupeaux sauvages de buffles autochtones (Syncerus caffer)[50] et leur principal prédateur le lion.
Les premiers cas n’ont été détectés chez le buffle qu’en 1990 dans le parc national Kruger[50] ; en 1999 plus de 70 % des buffles africains (Syncerus caffer) étaient tuberculeux dans le sud du Parc[51]. Une transmission inter-espèce vers le koudou et l'antilope, le chimpanzé, le babouin, ainsi que le lion a été constatée, avec des conséquences graves pour la biodiversité de la région[52],[53].
Des preuves et indices semblent disculper la faune sauvage en tant que cause première ou importante par rapport aux pratiques d'élevages. De plus la vaccination a montré dans le cas de la rage une efficacité très supérieure aux tentatives d'éradication des animaux qui avaient été supposés responsables des épidémies dans les élevages. Dans un autre domaine, mais avec des enjeux en partie similaires, les études écoépidémiologiques concernant le H5N1 et la grippe comme zoonose ont aussi pointé l'importance des transferts d'animaux malades par l'homme, de la gestion des déchets animaux (épandage, gestion des cadavres, etc.) et des pratiques d'élevage dans les épidémies touchant les élevages.
Comme c'est une zoonose, les stratégies de lutte devraient à la fois porter sur le contrôle de la bactéries dans les élevages et dans la faune sauvage et domestique (chiens, chats, etc.). Cependant la prévalence de la maladie dans la nature, et les relations entre faune sauvage et bétail sont encore mal connues.
La tuberculose est l'un des premiers bacilles découverts et étudiée par les hygiénistes.
En 1901 Von Behring, assistant de Robert Koch et premier lauréat du prix Nobel de physiologie ou médecine, déclarait lors de la cérémonie de remise du prix : « Comme vous le savez, la tuberculose chez les bovins est l'une des maladies infectieuses les plus dommageables qui puisse affecter l'agriculture » [73].
Un siècle plus tard, l'incidence de la maladie était fortement réduite ou contrôlée dans la plupart des pays riches, avec parfois des pics 2,8 % des bovins en l’an 2000 en Grande-Bretagne sauf dans le sud-ouest où ce taux est plus important, avec une augmentation exponentielle de cas en 10 ans malgré la destruction des blaireaux qui étaient suspectés de véhiculer le bacille entre troupeaux [74].
Pour mieux contrôler la maladie, il faudrait aussi mieux la contrôler dans la nature, chez les espèces dites « réservoir ». Les tentatives d'éradication des espèces porteuses s’avèrent souvent être des échecs et être couteuses, voire avoir un effet inverse à ce qui était espéré, en étendant par exemple les zones touchées. La vaccination est une piste qui semble potentiellement efficace
L'examen clinique d'un animal vivant permet éventuellement de détecter des lésions évoquant la tuberculose[4]. L'examen histopathologique augmente la confiance du diagnostic[4], mais seul l'isolement bactériologique de Mycobacterium bovis de la lésion permet de poser le diagnostic définitif[4]. La sensibilité de l'examen post mortem brut est affectée par la méthode employée et les sites anatomiques examinés[4].
Ils sont nécessaires pour le dépistage sur animal vivant ou la recherche des causes sur des animaux morts. Des faux positifs et des faux négatifs sont possibles. Si un test était positif et que l'examen post-mortem ne trouve pas de lésions caractéristiques de la tuberculose, cela peut être dû à une infection précoce, une technique d'autopsie inadaptée ou à une infection par des mycobactéries autres que M. bovis[4]. Un examen bactériologique est nécessaire pour confirmer ou non la présence de la bactérie[4].
Sur animal vivant, les tests les plus pratiqués aujourd'hui sont :
Il varie beaucoup selon les lieux et les moments. Il n'es pas ou très peu pratiqué dans les pays dits pauvres ou émergents.
Dans les pays dits riches ou industriels, il est souvent pratiqué en routine, mais plus fréquent dans les zones classées à risques ou dans les années suivant l'émergence d'un nouveau foyer et dans les zones périphériques à ce foyer. À titre d'exemple, dans les années 2000 au Royaume-Uni, tout bovin (sauf certains bœufs en engraissement, devait subir un dépistage obligatoire tous les 1, 2, 3 ou 4 ans selon la zone où est situé l'élevage. L'intervalle entre deux dépistages variait selon la zone (selon le degré de risque estimé en fonction de la déclaration ou non de foyers les 2, 4 ou 6 années précédentes dans la zone, avec réévaluation annuelle (ou à l'occasion d'un nouveau foyer de BT) par l'autorité sanitaire (Animal Health)[77]
L'Union européenne a une stratégie visant à limiter voire éradiquer la maladie dans les États-membres, par un strict contrôle des maladies dans les échanges intracommunautaires de bétail. Pour des raisons de sécurité sanitaire, les États-membres doivent pratiquer dans les élevage jugés indemnes de maladie le dépistage pré mouvement (c'est-à-dire chez l'éleveur avant transfert vers l'acheteur), 30 jours avant toute exportation vers un autre pays européen. Il existe aussi un dépistage aléatoire ou post-mouvement (chez l'acheteur).
Mais dans les années 2000, la situation sanitaire des troupeaux varie encore selon les pays et les conditions environnementales, conduisant à une situation épidémiologique hétérogène[78].
Les 10 nouveaux entrants avaient en 2004 presque éradiqué la maladie (0,2 % de prévalence[79]), mais des préoccupations persistent sur les risques de détection tardive ou l’apparition de nouveaux variants plus virulents ou l’introduction de microbes avec des animaux importés[79].
Elle semble être une piste potentiellement la plus efficace, en accompagnement d'une meilleure politiques de gestion de risques sanitaires dans les filières de l'élevage ; d'autant que d'importants progrès ont été récemment accomplis en matière de vaccination contre la tuberculose[80] et que de nombreux auteurs ont conclu dès la fin du XXe siècle, d'après les retours d’expérience sur la rage, d'autres maladie et selon les données disponibles sur la tuberculose, que l’approche la plus prometteuse était la vaccination des animaux sauvages en accompagnement de la lutte contre la maladie dans les élevages. Par exemple, le blaireau pourrait en Angleterre être vacciné[81]. Ceci est encore plus vrai dans les pays en développement où la mise en place d’un système complet de veille sanitaire et de tracabilité serait plus couteuse et difficile[81].
Pourtant, la vaccination pose encore deux problèmes :
Un premier vaccin fut expérimenté en 1886 par Vittorio Cavagnis[83] tandis qu'à cette même époque Robert Koch tenta vainement de développer un sérum curatif basé sur la tuberculine[84].
En 1902, à partir d'un bacille d'origine humaine atténué, Behring tente de produire un vaccin contre la tuberculose bovine : le « bovovaccin ».
Behring proposa également, sans succès, la « tuberculase »[85].
Toujours dans le domaine vétérinaire, Koch essaya le tauruman. Pour mémoire, il faut aussi citer le sérum de Marmorek ( 1904), le sérum de Maragliano, les sérums de Richet et Héricourt, ainsi que les tentatives peu honnêtes de Friedmann (en) et de Spahlinger[86].
C'est en 1921 qu'Albert Calmette et Camille Guérin de l'Institut Pasteur de Lille essayent avec succès le premier vaccin contre la tuberculose sur lequel ils travaillaient depuis 1908 - qui était conçu pour être un vaccin vétérinaire. Baptisé BCG (pour Bacille de Calmette et Guérin ou Bilié de Calmette et Guérin) ce vaccin issu d'une souche vivante atténuée de Mycobacterium bovis deviendra obligatoire en France en 1950.
La mortalité et morbidité des animaux d'un troupeau ont un coût pour l'éleveur.
Les stratégies de lutte contre la maladie pourraient s'appuyer sur les soins vétérinaires et la vaccination, mais